À l’ère de l’industrie connectée 4.0, les défis sont nombreux pour les entreprises qui feront face dans les prochaines décennies d’une part à une pénurie de main d’œuvre, d’autre part à la nécessité d’acquérir de nouvelles compétences.

L’accélération de la numérisation, la robotisation, l’Intelligence Artificielle et les objets connectés changeront la donne. S’ajouteront à cela les problématiques de rétention et de mobilisation des équipes qui seront de plus en plus multigénérationnelles et multiculturelles.

Comment faire face à ces changements majeurs? Par une transformation inévitable de l’approche et du rôle des gestionnaires. Il s’agit d’un mouvement déjà en branle et qui ne fera qu’évoluer. Nous sommes à l’ère où le gestionnaire n’est plus là pour planifier, contrôler, superviser et diriger, mais plutôt pour inspirer, donner du sens, mobiliser et faciliter. C’est le passage du rôle de gestionnaire à celui de leader. Ce phénomène est entamé et ne fera que prendre de l’ampleur.

Le 25 octobre dernier, j’assistais à la 3ème édition du Sommet Performance où 400 professionnels étaient rassemblés pour aborder le thème «Le gestionnaire 4.0 n’est pas un robot». Tout au long des conférences, il a été question des défis technologiques, des chocs intergénérationnels et des nouvelles habiletés à développer. Les gestionnaires devront composer et tirer avantage de ces réalités pour améliorer le potentiel de leurs équipes et de leur organisation.

Plusieurs conférenciers dynamiques, très expérimentés et passionnés nous ont offert des pistes de solutions ou des outils à mettre en application pour faciliter cette transition.

Quelques points m’ont marquée plus fortement. Ces sujets essentiels permettront de bien naviguer dans les prochaines décennies. Ils demeurent cependant encore peu intégrés dans la réalité quotidienne des entreprises et des gestionnaires. On en parle, mais de là à faire la transition et à passer à l’application, il reste du chemin à faire.

Je vous propose donc un résumé de ces points qu’il vaut mieux anticiper et développer afin d’être le mieux préparé possible en vue des changements déjà en cours.

Une utilisation sensée de la technologie pour libérer du temps au gestionnaire et lui permettre de faire une différence là où cela compte.

Il pourra ainsi motiver ses équipes à se dépasser et mieux communiquer pour partager l’intelligence commune. Pour y parvenir, la technologie offre des outils probants permettant d’organiser les tâches routinières et de suivre les performances afin de faciliter les décisions d’ajustement requises. On cherche ici à créer un «Hub» de connexions donnant accès à des outils multiples qui serviront à :

  1. Organiser les rituels quotidiens de l’organisation et des individus (rencontres d’équipes, maintenance de machines, analyse de rapports, gestion des performances, suivi de données de projets, etc.)
  2. Regrouper et assurer l’évolution des compétences et du savoir des gestionnaires en intégrant des indicateurs pour suivre leur progression (KBI : Key behavioral indicators + KKI : Key knowledge indicators).

Les organisations ont intégré les indicateurs de type financiers (KFI) et ceux de performances organisationnelle (KPI) qui sont assez bien maitrisés, mesurés et analysés. Toutefois, l’entreprise et les gestionnaires ont des lacunes en ce qui a trait principalement à l’identification des bons comportements de réussite recherchés (KBI) et des savoirs (KKI) à cultiver et partager.

Comme nous le mentionne Jean-philippe Raiche, associé chez Proaction International : « On veut ultimement muscler le gestionnaire vers de nouveaux axes de performance, soit les compétences de savoir-être et de communication et, surtout, mieux les outiller pour les amener à plus d’autonomie. Le but, exploiter davantage leur potentiel. » Une transformation essentielle pour faire progresser les équipes et les organisations.

Le développement et l’entretien de nouvelles habiletés humaines afin d’inspirer confiance et de devenir un grand leader que les troupes désirent réellement suivre.

Tout d’abord, l’humain existe à travers les autres. Nous sommes foncièrement des êtres de groupe. Le besoin d’adhérer à une collectivité et d’y participer est fondamental. Nous ne sommes pas faits pour vivre isolé et seul. Il devient donc plus pressant que jamais de développer les aptitudes et qualités humaines permettant de se préparer aux défis des prochaines décennies. Grâce à l’analyse de diverses personnalités des domaines du sport et des affaires, Sylvain Guimond, conférencier et auteur, nous a partagé sa vision du leadership de demain : un mélange de savoir-faire relationnel et de savoir-être.

Fort d’avoir côtoyé de nombreuses personnalités différentes à travers ses années d’expérience à titre de docteur en biomécanique, il constate que ceux qui se démarquent comme Leaders naturels possèdent tous la capacité de demeurer eux-mêmes, d’agir de façon naturelle et dans le respect de leurs convictions personnelles. Elles inspirent par leur vulnérabilité, leur sincérité/authenticité, leur générosité, leur résilience et leur capacité de rêver et d’être un joueur d’équipe.   Il n’est donc pas question ici d’intelligence intellectuelle, de performance, de résultats, mais bien de savoir-être et d’intelligence émotionnelle.

Afin d’évoluer en symbiose avec l’environnement et d’ainsi s’imposer et perdurer comme leader, voici, d’après des gestionnaires d’expérience, quelques habiletés à cultiver.

L’agilité organisationnelle se démarque par sa créativité et son innovation. Pour se faire, il devient essentiel de laisser place aux émotions et à l’intelligence collective, des carburants puissants.

En général, l’expérience démontre, appuyé par les dires de spécialistes, que les émotions positives créent un environnement plus calme propice à la créativité et qu’il importe de les cultiver. C’est aussi propice pour favoriser la mobilisation.

Certaines émotions négatives peuvent aussi avoir un impact positif sur votre organisation. Oui, oui vous avez bien lu, même les émotions négatives peuvent être un moteur intéressant dans certaines situations.

Lorsque l’on vit une émotions positive faible soit le quadrant vert (par exemple : calme) cela est propice à la créativité.  Vous vous laissez de l’espace sans pour autant ressentir la pression qui rend généralement inefficace cette activité.

Par contre, si vous vivez une émotion négative forte, en l’occurrence du stress ou de la frustration (cadran rouge), il faut chercher à canaliser cette énergie pour transformer le tout de manière constructive. Cela pourra par exemple mener à plus d’efficacité puisque l’émotion motivera la prise d’actions pour évacuer cette énergie.

Nous avons traité plus en profondeur de ce sujet dans un autre blogue. Toutefois, tel que mentionné par le conférencier Jean-François Bertholet, consultant, conférencier et formateur en développement organisationnel, les études démontrent que le dénominateur commun des organisations qui ont plus de succès lors de transformations tient en ces quatre états d’esprit qu’elles partagent :  

  • Focus : La capacité à faire abstraction des éléments dérangeants pour avoir l’esprit clair et prendre de meilleures décisions;
  • Enthousiasme : La capacité à communiquer notre intérêt et à mettre son énergie et son cœur dans ce que l’on fait dans le but de créer des résultats surprenants et hors de l’ordinaire;
  • Momentum : L’effet domino, l’élan et la vitesse d’évolution d’une organisation souvent accélérée lorsque l’on contacte l’énergie des autres et les actions concrètes qui encouragent à suivre le courant;
  • Énergie. L’intérêt, la volonté et la puissance déployées qui permettent d’agir et de réagir.

Cultivons-les sans attendre!

Le choc des générations auquel le gestionnaire devra inévitablement être confronté suite à l’intégration du multigénérationnel au sein des équipes.

C’est une réalité qu’on ne pourra contourner selon le spécialiste en psychologie et éducation, conférencier et auteur international Carol Allain. Le gestionnaire 4.0 de demain devra développer sa capacité à interagir en considérant différents besoins, environnements, motivateurs, etc. Il devra apprendre à naviguer avec ces facteurs qui ne cesseront d’être chamboulés. Le progrès sur cette voie permettra de mobiliser et de retenir les employés au sein de l’organisation. Voici un portrait succinct que nous offre ce fascinant conférencier pour décortiquer et mieux comprendre ce qui motive les différentes générations. Nous sommes à l’ère du « Nous » rassembleur plutôt que du « Je » triomphant. Une transition qui ne se fait pas sans heurt.

Le gestionnaire de demain devra être inspirant pour qu’on ait envie de le suivre. Il sera axé sur la proximité, donc capable de relation humaine vraie, d’authenticité et de générosité sentie. Capable de ressentir et de faire ressentir les émotions, il créera un environnement où il est possible de rêver et de se réaliser.  On passera d’une gestion verticale où organisation rimait avec opération, performance, résultats, encadrement à une gestion horizontale où l’organisation doit maintenant être synonyme de collaboration, flexibilité, participation et création commune. En bref, votre organisation et vos gestionnaires doivent créer un environnement donnant du sens à la vie de leurs employés. La quête d’accomplissement professionnel n’est donc plus l’unique motivation.

En conclusion

Avez-vous dans vos rangs ce genre de gestionnaire? Avez-vous amorcé la transition requise pour réussir la cohabitation des équipes multigénérationnelles? Comment cela se passe-t-il?

Tous ces changements doivent s’opérer dans le temps, bien entendu, mais ils doivent dès maintenant devenir votre priorité. Pour ma part, je trouve cela plutôt encourageant d’observer la direction que prend le poste de gestionnaire.

Et vous, êtes-vous en voie de devenir un leader de demain accompli?

Référence :

  • Sommet performance 2018, 25 octobre, Hôtel Fairmount Reine Élizabeth
  • Le choc des générations, 9ème édition, Éditions Château D’encre, Carol Allain

Magali Pelletier est entrepreneur, stratège et formatrice. Elle Cumule plus de 15 ans d’expérience professionnelle en entreprises manufacturières et de services comme spécialiste en gestion marketing et stratégie de développement de produits. Consultante depuis 2013, elle offre des services de consultation, des formations sur les grands thèmes actuels en gestion et développement de l’innovation et effectue des études d’opportunités pour explorer de nouvelles idées ou marchés. www.strategiemp.com